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Avec Puro, Miko veut équilibrer la balance entre culture du café et environnement 

En 2005, le torréfacteur belge Miko lançait une petite marque de café durable et équitable : Puro. Près de 20 ans plus tard, le succès commercial est tel que celle-ci représente désormais près de 50% des activités de l’entreprise. Sa philosophie ? Rendre à la nature ce que l’homme lui prend par le biais de l’agriculture. 

Fondé il y a plus de 200 ans, le torréfacteur belge Miko, spécialisé dans le B2B (bureaux, hôtels, restaurants, cafés…) en Belgique comme à l’international, a posé en 2005 un choix stratégique qui allait par la suite s’avérer déterminant. « C’est à cette époque que nous avons introduit Puro pour constituer le volet durable de notre offre. Mais au fil des ans, la marque a fini par véritablement prendre d’assaut notre entreprise, dans le bon sens du terme, au point de représenter désormais près de 50% de nos activités », explique Stijn Michielsen, directeur export & green coffee au sein de la société. « Non seulement Puro a rencontré un succès commercial remarquable et nous a ouvert de nombreuses portes à l’international, mais surtout, la marque a transformé notre entreprise qui a depuis lors véritablement embrassé l’idée de développer un business durable. » 

2% des ventes au World Land Trust 

Cette aspiration en faveur de la durabilité s’exprime principalement au moyen d’un vaste programme de protection des forêts tropicales mis en place avec l’ONG britannique World Land Trust. « Depuis le premier jour, nous nous sommes auto-imposés une taxe de 2% sur les ventes de cafés, pas sur les bénéfices », détaille Andy Orchard, créateur de Puro. « Chaque trimestre, nous analysons combien de café nous avons vendu, et nous transférons l’argent vers un fonds dédié. Ensuite, au moins une fois par an, je m’assois avec WLT et nous déterminons où cet argent doit aller, en fonction de plusieurs critères : ce que veut l’ONG, ce dont Miko a besoin, ce que je souhaiterais pour notre storytelling, etc. »

Plus concrètement, l’argent issu de Puro est utilisé par World Land Trust pour implémenter des réserves naturelles dans les pays où la marque se fournit en café. « Le café pousse dans des zones qui disposent de la plus grande biodiversité au monde. Mais c’est également dans cette ceinture du café que se produit le plus de déforestation. L’ambition de Puro est donc d’y protéger la nature et la biodiversité, le temps que le monde recouvre ses esprits », poursuit Andy Orchard, qui regrette au passage le focus mis actuellement par les autorités et l’industrie sur les seules émissions de CO2. « Notre monde a choisi de se concentrer sur ce point précis, qui fait pourtant partie d’un gigantesque système interconnecté. En tant qu’entreprise, Miko se doit de suivre cette norme. Mais avec Puro, nous essayons également de nous inscrire dans une beaucoup plus holistique vis-à-vis de la nature. » 

S’il fallait résumer en une seule phrase la philosophie qui anime Puro, ce serait sans doute : rendre à la nature ce que l’homme lui prend par le biais de l’agriculture. « Et comme nous vivons dans un monde où l’on a tendance à prendre beaucoup à la nature et à rendre peu, chez Puro, nous rendons bien plus que ce que nous prenons », assure le créateur de la marque de café. Ainsi, ce dernier évalue à 27 km² (dans 6 pays) la surface agricole utilisée pour produire les cerises de café achetées par Puro, tandis que les réserves naturelles mises en place par la marque s’étendent désormais sur quelque 526 km² (dans 13 pays), soit un ratio d’environ 1 pour 19. « Et lorsque nous amenons de nouvelles origines dans nos cafés, nous incitons par la même occasion World Land Trust à développer de nouvelles relations avec des ONG locales dans ces pays », ajoute Andy Orchard. Et si l’on en croit le créateur de Puro, le café se profile même de plus en plus comme un outil de préservation de la nature dans certaines régions. « Les communautés locales à travers le monde ne veulent pas détruire leurs forêts, mais elles ont besoin d’argent. C’est pourquoi de plus en plus d’ONG se tournent vers nous pour que nous les aidions à développer des cultures de café qui permettent également de conserver l’environnement alentour, notamment grâce à un couvert forestier d’arbres locaux. Pratiquée de la bonne manière, la culture du café peut donc servir à enrayer la déforestation. » 

100% Fairtrade 

Mais l’ambition ne se limite toutefois pas à la seule préservation de la nature. « Cela nous amène à un second élément très intéressant de la philosophie Puro : tout le café que nous vendons est certifié Fairtrade, et une partie est également bio », explique encore Stijn Michielsen, soulignant  que Miko avait récemment été mis à l’honneur par Fairtrade Belgium comme étant l’entreprise belge qui avait octroyé le plus haut montant de prime Fairtrade en 2023 au niveau international. « L’ensemble des cerises de café que nous achetons provient de coopératives », poursuit le directeur export & green coffee. « Dans certains cas, la relation est très directe, avec certains partenaires privilégiés, et dans d’autres le lien est plus distant. Mais nous savons toujours d’où vient notre café, tandis que Fairtrade International conserve une vue globale de toute la chaîne et s’assure que tout s’y déroule de manière correcte. » Cela signifie donc que tous les caféiculteurs qui fournissent Puro, qu’ils soient du Honduras, du Pérou, de Colombie ou encore d’Ouganda, sont rémunérés au prix minimum fixé par Fairtrade International. Et à ce prix s’ajoute encore une prime destinée aux coopératives, qui sont libres de l’utiliser à leur guise dans l’intérêt de leurs membres, voire une prime bio selon les cas. 

De quoi permettre à tous les producteurs de café d’atteindre le living income ? « Le prix minimum Fairtrade ayant fortement augmenté depuis l’été dernier, je pense que dans l’ensemble, c’est le cas », avance Stijn Michielsen. « Bien sûr, il faut garder en tête que les niveaux de vie peuvent être très différents de pays en pays. Par conséquent, il n’est pas facile de définir un prix qui convienne à tous et à toutes les conditions. Mais nous faisons confiance à Fairtrade pour que son prix minimum soit suffisant pour permettre à tout le monde d’avoir une rémunération décente. » Après une dizaine d’années de statu quo, Fairtrade a en effet augmenté ses prix minimums garantis pour le café en août dernier, ceux-ci étant passés à 1,80 dollar la livre pour l’Arabica lavé et 1,25 dollar pour le Robusta lavé. Pour parvenir à ces montants, l’organisation a procédé à l’analyse des coûts de production dans 12 pays sur 3 continents, explique-t-elle sur son site internet. Pour plusieurs de ces pays, Fairtrade a par ailleurs également pu déterminer un living income reference price, c’est-à-dire le montant minimum nécessaire pour qu’un foyer puisse subvenir aux besoins de ses membres. Fairtrade arrive à la conclusion que son nouveau prix minimum garanti (pour l’Arabica), combiné à la prime bio, permet d’atteindre le living income reference price en Colombie et en Ouganda. Par contre, l’organisation constate que ce n’est pas le cas en Indonésie et au Honduras, même si l’écart séparant les deux paramètres est désormais plus faible. 

Danser avec le diable 

Fort du succès commercial de Puro, pourquoi Miko ne convertit dès lors pas l’ensemble de sa production à sa marque durable et équitable ? « You’ve got to be in it to win it (Pour pouvoir gagner, tu dois d’abord en être, NDLR) », résume Andy Orchard, en guise de conclusion. « Je vais donner un exemple, sans citer de noms. Je me souviens qu’une fois, dans l’un des pays les plus riches d’Europe, tous les ministères avaient lancé un appel d’offres pour du café, aucun n’avait souhaité payer pour du café équitable… Dès lors, si Miko se présente avec Puro dans ce genre d’appels d’offres, qui constituent de très gros contrats, nous sommes certains de ne pas l’emporter. Il faut donc parfois savoir danser avec le diable d’une certaine manière, dans le sens où il faut d’abord établir une relation avant d’ensuite avoir une chance de la faire évoluer de manière positive.  D’un côté, on pourrait dire que nous nous contredisons, mais d’un autre côté, nous essayons de faire bouger les choses, et ça marche. Puro est parti de zéro et représente aujourd’hui près de la moitié de Miko.

Comment voyons-nous les choses dans 10 ans ? Idéalement, nous serons à 100% Puro. Mais effectuer un tel bond dès demain signifierait perdre la moitié de notre business, la moitié de nos employés, etc. » Et Stijn Michielsen d’ajouter : « Les choses doivent se faire par étape. Non seulement parce que nous avons une responsabilité vis-à-vis des personnes qui travaillent pour nous, mais aussi parce qu’il y a toujours pas mal de consommateurs qui ne sont pas demandeurs de plus de durabilité. » 

Propos recueillis par Anthony Planus pour le Trade for Development Centre d’Enabel. 
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