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L’envol du colibri à Namur : la boutique de mode qui fait sa part

Nous voulons faire passer un message, changer le monde.

À Namur, Sophie Depas et Esther Sougné ont ouvert la boutique L’envol du colibri fin 2019 après avoir proposé pendant deux ans et demi des vêtements en ventes privées et sur des salons équitables. Elles défendent l’idée d’une mode éthique et durable, à travers des marques pour femmes et hommes. Interview.

Elles sont deux derrière la création de la boutique L’envol du colibri. Sophie Depas et Esther Sougné se connaissent depuis quinze ans : ”Au moment où nous nous rencontrons, nous avons envie de vivre au plus proche de ce que nous sommes profondément : l’une aime le contact avec les gens et rêve d’une boutique depuis toujours, l’autre est indépendante dans l’âme et veut être libre de penser et d’agir comme elle l’entend”, racontent-elles sur leur site web.

L’envol du colibri naît en mars 2017 : “Cela faisait un moment que l’on rêvait d’un projet ensemble mais qui soit vraiment en adéquation avec nos convictions, nos valeurs, notre philosophie de vie”, nous explique Sophie Depas par téléphone. C’est bien sûr la légende du colibri popularisée par Pierre Rabhi qui a donné son nom au projet. 

Pendant plusieurs années, elles mûrissent leur réflexion : “Toutes deux, nous avons besoin d’authenticité, d’un retour à un mode de vie plus doux (« slow ») et plus proche de la nature. Nous sommes concernées par l’environnement et le bien-être des hommes comme des animaux. Nous recyclons, nous mangeons bio, nous recherchons des moyens naturels pour nous soigner et transmettons les mêmes valeurs à nos enfants. Quelle planète allons-nous leur laisser ? Cette question est ancrée en nous, dans notre quotidien, au cœur de nos foyers et nous voulons agir. Nous voulons faire passer un message, changer le monde”, continuent-elles sur leur site.

C’est en effet au même moment que les deux femmes ont changé leurs comportements de consommatrices : “La naissance de nos enfants a été déterminante. Tout s’est fait progressivement : notre alimentation a évolué, nos produits de soin, d’hygiène, d’entretien sont devenus plus naturels, et au niveau des vêtements nous faisions de plus en plus le choix du seconde main”, se rappelle Sophie Depas. 

La catastrophe du Rana Plaza en 2013 : “une prise de conscience”

Mais un électrochoc va les pousser à aller plus loin : “Pour nous, cet électrochoc, c’est la catastrophe du Rana Plaza en 2013”. Symbole des dérives de la fast fashion, l’effondrement de l’immeuble Rana Plaza qui abritait des ateliers de confection dans les faubourgs de Dacca, la capitale du Bangladesh, avait fait plus de 1100 morts le 24 avril 2013 et ému la planète entière, qui prenait subitement conscience des conditions de travail de celles (majoritairement) et ceux qui fabriquent les vêtements des grandes marques.

Sophie Depas se souvient : “Cet événement triste, dramatique nous a fait prendre conscience de ce qu’était le  monde de la mode. On ne voulait plus y prendre part à n’importe quel prix. On a fait des recherches sur des marques plus respectueuses de l’environnement et des conditions humaines liées au travail. Et L’envol du colibri est né de cette envie de partage : il y a moyen de travailler avec des marques plus respectueuses que ce que l’on connaît toutes et tous”.

Des ventes privées à la boutique namuroise

Depuis son lancement en 2017, le projet a déjà bien évolué : “D’abord, nous avons organisé des ventes privées au domicile de particulières. Nous ne faisions que les vêtements pour femmes. Jusqu’à octobre 2019, c’était principalement comme cela que nous fonctionnions avec en plus des pop-up stores dans les magasins bio et la présence sur de nombreux salons, principalement en Wallonie et un peu à Bruxelles et en Flandre”, résume Sophie Depas.

“Depuis l’été 2019, nous proposons aussi de la mode pour hommes pour répondre aux demandes”. Et depuis octobre dernier, gros changement : “Nous nous sommes installées sur Namur ! Cela répondait aussi à une demande de notre clientèle qui ne trouvait pas forcément agréable d’essayer des vêtements dans des salons”. Le projet est né en visitant un autre magasin : “Nous avons eu l’occasion de collaborer avec une super boutique à Ath qui faisait de l’éthique. On a eu un coup de coeur et le désir d’avoir également la nôtre s’est confirmé. Ensuite, tout s’est accéléré, on a recherché une surface commerciale et on a ouvert en octobre dernier au coeur de Namur”, se réjouit Sophie Depas.

Un webshop qui cartonne en ce moment

Grâce à cet espace, Sophie Depas et Esther Sougné ont pu agrandir leur offre : “Nous proposons plus d’accessoires, et à présent plus de bijoux, des chaussures, des parfums, et même des articles zéro déchet.” Pour se centrer sur ce nouveau défi, elles ont arrêtés les ventes à domicile et les nombreux salons auxquels elles participaient : “On peut éventuellement privatiser la boutique pour que quelqu’un fasse découvrir nos marques. Mais recommencer à se déplacer, c’est compliqué.”

Mais pour celles et ceux qui voudraient découvrir les collections proposées par L’envol du colibri et commander ses produits, il y a un e-shop : “On l’a ouvert dès le début en 2017, et, avec le confinement, on remarque une recrudescence des commandes en ligne. Les gens qui nous connaissent continuent ainsi d’acheter nos vêtements. “

Le label GOTS pour repérer les marques à suivre

Esther Sougné et Sophie Depas ne travaillent qu’avec des marques qu’elles connaissent : “De nombreuses marques nous accompagnent depuis le début. À la boutique, nous avons quatre critères : le choix de matières naturelles ou bio, recyclées ; le respect de la dimension équitable, éthique ; le vegan, il n’y a pas de matière animale, pas de soie, pas de laine, pas de cuir dans nos rayons ; et enfin la gamme de prix qui doit rester abordable, pour vous donner une idée nous sommes dans la fourchette de la marque Esprit”, détaille Sophie Depas.

Pour choisir les marques qui rempliront leurs étalages, Sophie Depas et Esther Sougné se servent des labels : “Principalement du label GOTS, qui est le plus courant et garantit au moins 75 % de matières bio dans le produit ainsi qu’ un respect de la chaîne des travailleurs et travailleuses”. Au niveau des matières, ce sont souvent les mêmes qui reviennent : “Coton bio ou recyclé, chanvre, bambou, lyocell (pulpe de bois)”.

Sur les conditions de travail dans lesquelles sont réalisés les vêtements, Sophie Depas dit ceci : “Nous travaillons avec des marques européennes qui ont pignon sur rue pour la plupart et qui mettent en avant la transparence sur le mode de transport, de confection et leurs partenaires. Les ateliers de confection de ces marques se situent principalement en Asie, car c’est là d’où provient la matière première. Mais ils respectent les règles de travail éthique.”

Des marques triées sur le volet

Les deux associées repèrent ces marques grâce à un grand salon pour professionnel-les à Berlin : “Ce salon a lieu deux fois par an. Nous y allons chaque année en janvier. Il est spécialisé en mode éthique et éco-responsable. C’est là que l’on découvre de nouvelles marques. Et il y en a de plus en plus !”

En Belgique aussi ? “Nous collaborons avec une marque de vêtements belge, UP-RISE qui travaille avec du chanvre et du coton bio. Nous les connaissons depuis le début, car ils ont une boutique à Leuven. Nous nous fournissions là-bas. C’est une valeur sûre. Nous soutenons aussi de nouvelles marques françaises sur les accessoires notamment, et des marques européennes principalement : hollandaises, allemandes et une espagnole.”

Pour les cosmétiques, L’envol du colibri travaille avec Kari’T-Care, une productrice de Sombreffe dont nous avons déjà parlé ici : “Nous avons toujours testé nous-mêmes les produits que nous vendons. Cela fait partie de notre envie de partager. C’est une conviction personnelle. Pareil pour le parfum français réalisé à partir d’alcool de blé que vous pouvez trouver chez nous : testé et approuvé !” Pour d’autres accessoires, L’envol du colibri collabore également avec d’autres marques, principalement belges : “Woodstag, Koshi, Toussa Toussa, etc.”, énumère Sophie Depas.

Des rencontres sur les salons et grâce à la Belgian Fairtrade Federation (BFTF)

L’envol du colibri fait également partie de la BFTF qui promeut le commerce équitable : “Ce qui est très agréable, c’est qu’ils mettent en lien leurs membres via newsletter et leurs assemblées générales notamment, c’est une association sur le terrain qui a à coeur de promouvoir ses membres. On en fait partie depuis le début. C’est important d’avoir ce genre d’élément fédérateur.” Ces rencontres ainsi que toutes celles faites sur les salons au contact d’autres exposantes et exposants ont vraiment permis à Sophie Depas et Esther Sougné d’évoluer : “Si l’on s’est toutes les deux tournées de plus en plus vers le zéro déchet, c’est grâce à ces rencontres sur les salons, vraiment porteuses. Si l’on avait ouvert directement le magasin, on n’aurait pas eu la chance de découvrir tout ce monde et de s’enrichir ainsi. Nos comportements tournés vers le zéro déchet viennent de ces rencontres”, reconnaît Sophie Depas.

En attendant la réouverture de leur boutique qui venait à peine d’être inaugurée, Sophie Depas et Esther Sougné réfléchissent à la suite : “On a été coupées dans notre lancée, mais ce n’est pas grave d’être freinées en plein vol. Notre beau départ, on pourra le reprendre à la réouverture. Et on ne compte pas non plus s’arrêter en si bon chemin”, nous promet Sophie Depas.

Crédits photos : L’envol du Colibri

info@lenvolducolibri.be

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